samedi 30 janvier 2016

La Splendeur dans l'herbe de Patrick Lapeyre

Au début, on dirait des ombres. Un homme et une femme parlent ensemble de ceux qui les ont trahis. Ils en parlent sans cesse, obsessionnellement, à chaque fois qu'ils se revoient. Jusqu'à ce que se noue entre eux, et presque malgré eux, une étrange relation amoureuse, dont l'accomplissement semble continuellement retardé. Comme si l'envoûtement de la conversation leur faisait oublier tout le reste.

Homer la quarantaine aux airs d’adolescent brisé, Sybil belle et séduisante  se rencontrent  peu  de temps après leurs séparations.
Ce sont deux être blessés, leurs ex-conjoints sont partis vivre ensemble à Chypre. Conjoints qui occupent  l’essentiel de  leurs conversations. Le désir amoureux  devient le moteur, le duo désabusé devient très  vite attachant. Les longs silences, les gestes inachevés, les frôlements, leurs maladresses, leurs espérances donnent une certaine intensité à leur relation.

"Nous sommes des amoureux bizarres... Je n'en reviens toujours pas de la chance que nous avons eu de nous rencontrer... Mais peut-être que nous le méritions, en fin de compte. "
Une relation qui malgré tout semble ne plus avancer , stagner…
«Homer n’ignorait pas, bien entendu, qu’on peut attendre séparément, chacun chez soi, et donner encore du temps au temps […], leur amour courait le risque de dépérir doucement et eux de décliner sans même s'en rendre compte, jusqu’à ce qu’ils forment un jour un couple de solitaires désenchantés ».
Parallèlement, on suit les errances trente ans plus tôt d’Ana, la mère d'Homer. Une femme qui aime entrer dans la vie d'inconnus, elle aime faire ami ami quelques instants avec des gens destinés à ne jamais être revus... Nous sommes au cœur d’un couple qui se déchire, on découvre l'enfance d'Homer, un enfant traumatisé et craintif. Ana un personnage qui donne encore plus d’intensité à ce roman.

Tout ces personnages fragiles, émouvants, nous racontent de belles choses sur le désir amoureux et font de La splendeur dans l’herbe une lecture dans laquelle on se sent bien.

La Splendeur dans l'herbe de Patrick Lapeyre Editions P.O.L

mercredi 27 janvier 2016

Au bonheur des lettres - Recueil de courriers historiques, inattendus et farfelus de Shaun Usher

C'est un beau-livre des éditions Du Sous-sol, 364 pages regroupant 125 lettres de personnalités et d'anonymes. Ces lettres représentent un hommage à l'art de la correspondance, compilant des missives de toute époque.

Drôle, amusant, émouvant, érudit, l'anthologie s'adresse au plus grand nombre et cultive l'art du coq à l'âne sans jamais perdre le lecteur. Outre l'aspect cocasse de certaines lettres, d'autres plus littéraires sont des outils de compréhension de l'oeuvre, que ce soit Virginia Woolf, Dostoïevski, Charles Dickens, Emily Dickinson, Flannery O'Connor, Ernest Hemingway, etc.  

J'ai hésité un moment, je l'ai feuilleté, je l'ai bien regardé, j'ai noté discrètement quelques belles phrases et m'en suis allé ... Aujourd’hui, j’ai revu ce livre, je l'ai feuilleté et j'ai craqué !!!

Son format est loin du livre poche, chaque de lettre  retranscrite est  illustrée ou accompagnée  d'un fac-similé  de belle qualité. Ce livre  fera sans doute un beau livre de chevet  voir un beau cadeau pour le partager.

En attendant d'en reparler , voici un extrait que j’ai déjà partagé et qui mérite de l’être à nouveau ...



"Mon cœur est empli de toi, personne hormis toi n'est dans mes pensées, pourtant quand j’essaie de te dire quelque chose qui ne soit pas pour le monde, les mots me manquent. Si tu était là... Nous aurions pas besoin de parler du tout, nos yeux murmureraient pour nous, et ta main rapide dans la mienne, nous ne quêterions pas de langage - J'essaie de t'attirer plus près, je chasse les semaines jusqu’à ce qu'elles passent à l'invisible."

Au bonheur des lettres  - Extrait d'une lettre d' Emily Dickinson à Susan Gilbert

mercredi 20 janvier 2016

En passant chez le libraire

Agatha Christie, le chapitre disparu
de
Brigitte Kernel

Qualifié déjà par certain comme étant un incontournables de la rentrée littéraire de janvier 2016.


"Voilà, le livre est fini. J'ai posé le point final. Le titre : Une autobiographie. Je ne me sens pas très à l'aise. Mon éditeur va s'en rendre compte. Des pages manquent : ma disparition à l'hiver 1926. Pourtant, j'ai bien écrit ce chapitre. Des pages et des pages, presque un livre entier. Mon secret. Ma vie privée. Une semaine et demie qui n'appartient qu'à moi."

C'est une histoire vraie. Un mystère jamais totalement élucidé. Une zone d'ombre qui demeure dans la vie d'Agatha Christie. Pourquoi et comment la reine du crime s'est-elle volatilisée dans la nature durant l'hiver 1926 ?

dimanche 17 janvier 2016

Une lettre de vous de Jessica BROCKMOLE


Mars 1912. La jeune et obscure poétesse Elspeth Dunn ne connaît d’autres horizons que celui de l’île de Skye, au large de l’Ecosse. Aussi est-elle à la fois étonnée et ravie de recevoir sa première lettre de fan de David Graham, un étudiant originaire de la lointaine Amérique. Tous deux entament alors une correspondance. Ils se confient leurs auteurs préférés, leurs espoirs les plus fous et leurs secrets les plus chers. Très vite, cet échange épistolaire donne naissance à une amitié profonde qui a tout d’un amour inavoué. Mais lorsque la Première Guerre Mondiale éclate et que David se porte volontaire comme ambulancier, Elspeth ne peut que l’attendre sur son île en espérant qu’il survivra, à moins de forcer le destin…
Juillet 1940, Edimbourg est bombardé. Dans l’appartement familial dévasté, Margaret découvre des dizaines de lettres adressées à une certaine Sue. Le lendemain, sa mère a disparu et il lui reste pour seul indice une unique lettre d’amour. En partant à sa recherche, Margaret va petit à petit lever le voile sur les mystères qui  entourent sa famille et ce père dont on refuse de lui parler.
J'ai opté pour la lecture de ce livre pour la couverture, le titre, mais principalement parce qu'il m'était proposé par une amie qui comme le héros vie de l'autre côté de l'atlantique.

En 1912, nous faisons la connaissance d'Elpeth Dunn, une jeune poétesse, mariée. Elle reçoit une lettre d'un étudiant-fan américain, une longue correspondance se met en place entre Davey et la poétesse. Ils communiquent pour ce découvrir, ce connaitre, par amitié. Bientôt les lettres échangées nous dévoilent des sentiments, des taquineries, des découvertes mutuelles et enfin de l'amour, il y a de la passion en eux. 


Sont-ils condamnés à être séparés par un océan ?


"L'envie vous démange forcement autant que moi de découvrir qui se cache à l'autre bout de cette correspondance"

Parallèlement, nous découvrons la jeune Margaret en 1940, qui une lettre à la main cherche à comprendre désespérément le passé de sa mère ; Et si ces deux histoires étaient liées !

"Je vous en prie, j'ignore tant de chose sur ma mère - tant de choses qu'elle ne m'a jamais dites. Je ne vous demande pas de prendre le thé avec moi ou de venir à mon mariage. Juste de m'accorder un peu de votre temps pour m'écrire et me parler d'elle."

C'est aussi une histoire de malentendu, de non-dit, alors faut-il résumé cette correspondance ?

Une belle correspondance, une écriture alternant habilement passé et présent, les deux guerres et les sentiments amoureux. Un beau roman épistolaire, aux personnages si attachants, bien rythmé tout en émotion…  


Vaste fresque épistolaire couvrant deux continents et deux guerres mondiales, Une lettre de vous est une véritable invitation au voyage célébrant la capacité de l'écrit à émouvoir.


mercredi 13 janvier 2016

Au revoir là-haut



Le pari était risqué, adapter en BD le célèbre roman de Pierre Lemaitre Au revoir là-haut, prix Goncourt 2013.  


1919. Au sortir de la guerre, la société française peine à ménager une place aux anciens poilus devenus encombrants, et les trafics les moins glorieux vont bon train. Albert Maillard, modeste comptable qui a sauvé la vie d’Édouard Péricourt, jeune fils de bonne famille, juste avant la fin des combats, tente de les faire vivre de retour à Paris. Édouard, défiguré, refuse de reprendre contact avec les siens et imagine une gigantesque arnaque à la nation pour tenter de se projeter dans une vie nouvelle, ailleurs.


Difficile évidement, d’adapter l’histoire dans son  intégralité et bien souvent comme au cinéma, devoir amputer des pans entiers d’une œuvre laisse parfois un goût amer. Mais là tout y est Edouard  ressuscité, l’arnaque aux monuments aux morts  et bien sûr Pradelle  qui compte bien s’enrichir grâce aux marchés publics liés à la récupération des cadavres.  Christian De Metter  avec peu de texte et  par le dessin transcrit bien  les expressions de terreur, douleur, d’amour, de joie . Il donne ainsi toute sa dimension à l’histoire.


La petite louise est réussie à la fois tendre et délicate,   Edouard la gueule cassée l’est tout autant le visage monstrueux  et presque souriant.

Les couleurs jouent un grand rôle, l’ocre de la guerre de tranchés, le bleu de la nuit et de la tristesse. Parfois pour bien comprendre la subtilité du dessin, il serait bien d’avoir lu le roman auparavant.

Au final Une belle BD, fidele à l'œuvre d’originale. Un récit tout en émotions !



Dessinateur / Christian De Metter
Scénario / Pierre Lemaitre
Éditions / Rue De Sevres